Les principales figures de l'opposition n'ont pas d'organisation à la hauteur de leur popularité
LE MONDE | 31.01.08 | 14h19 •
Contrairement à Nicolas Sarkozy, en délicatesse avec les sondages, les leaders de l'opposition ont les faveurs de l'opinion. Selon l'enquête publiée le 27 janvier par Le Journal du dimanche, les "personnalités les plus crédibles" face au chef de l'Etat sont Ségolène Royal (28 %), François Bayrou (25 %), Bertrand Delanoë (18 %) et Olivier Besancenot (14 %).
S'ils bénéficient d'un capital de popularité stable, voire en progression, ces quatre-là ont en commun de ne pas être parvenus, encore, à mettre en cohérence leur structure partisane et leur ambition.
Royal-Delanoë, désirs de courant. En tête des personnalités dont l'électorat de gauche souhaite qu'elles jouent un rôle, Ségolène Royal et Bertrand Delanoë ne disposent pas de l'appui d'un courant organisé.
Mme Royal reste très populaire parmi les adhérents - dont les effectifs ont chuté, passant de 218 000 à un peu plus de 150 000 entre fin 2006 et fin 2007 - mais n'a pas de réseaux militants structurés. Décidée à conquérir le parti, l'ancienne candidate à l'élection présidentielle a le choix entre deux stratégies.
La première consiste à nouer des alliances, en particulier avec François Hollande qui, fort du soutien d'une trentaine de fédérations, se verrait bien devenir le centre de gravité d'une large majorité. Cela permettrait au premier secrétaire de peser sur la désignation de son successeur, qui serait un "non-présidentiable". François Rebsamen, Julien Dray ou Pierre Moscovici sont prêts à jouer ce rôle. Autre option, la stratégie du "qui m'aime me suive", en déposant sa propre motion afin de pouvoir compter ses forces.
Issu de la famille jospiniste, Bertrand Delanoë n'est pas, lui non plus, un chef de courant. Les partisans de Lionel Jospin constituent aujourd'hui un groupe aux contours mal définis, sans que l'on sache si leur mentor - toujours actif en coulisses - a vraiment passé le témoin au maire de Paris.
Quant aux courants les plus anciens et les plus disciplinés au sein du PS, aucune personnalité n'est en mesure d'y imposer un leadership incontestable. Fabiusiens, strauss-kahniens et emmanuellistes, regroupés au sein du groupe dit des "reconstructeurs", s'efforcent de faire échec à Ségolène Royal comme à Bertrand Delanoë.
Bayrou, d'un parti de notables à un parti de militants. En refusant, au lendemain du premier tour de l'élection présidentielle, de se rallier au futur vainqueur, François Bayrou a fait un choix décisif. Il extirpait ainsi le centre du rôle de supplétif auquel le condamnait son alliance avec la droite. Non sans casse. La plupart des députés sortants, et nombre d'élus, ont préféré trouver refuge dans la "majorité présidentielle".
Le congrès de Villepinte, début décembre 2007, a marqué plus qu'un changement de nom, de l'UDF au Mouvement démocrate (MoDem), entendant ainsi briser le signe indien d'une formation qui n'a jamais réussi à s'imposer. Il a signifié le passage d'un parti de notables à un parti de militants. Cette nouvelle génération reste toutefois en quête de maturation et d'homogénéité. Pour le MoDem, l'équation est la suivante : un parti en construction, un projet à définir, mais un leader incontesté.
Besancenot, à l'étroit dans la LCR. Plus possible de continuer avec une petite organisation d'à peine 3 000 militants quand on est présenté comme "le meilleur opposant à Sarkozy". Olivier Besancenot caracole dans les sondages de popularité bien loin devant ses ex-partenaires de la gauche radicale. Il fallait à ce leader populaire une nouvelle structure, moins historiquement marquée et "plus large" que la "vieille Ligue".
Le porte-parole de la LCR a donc lancé, samedi 26 janvier, un appel pour un "nouveau parti anticapitaliste", destiné à accueillir tous les sympathisants rencontrés durant la campagne présidentielle et les "inorganisés" attirés par son verbe protestataire. Exit les références au trotskisme et le fonctionnement de militants professionnels.
Même si la direction de la LCR jure que cela ne sera pas le "parti d'Olivier", cela y ressemble fort : le manifeste de référence programmatique a été calqué sur sa campagne présidentielle et le profil militant affiché est celui du "jeune salarié radicalisé", "à l'image d'Olivier". L'échéance du congrès de fondation a été fixée à décembre 2008 ou janvier 2009.