MONNAIE / Un effet de l'euro fort : on paie en euros dans des boutiques de Manhattan
L'euro fait une timide percée à New York
Payer son tee-shirt « I love NY » en euros et non en dollars : certains commerçants de New York commencent à ouvrir leur tiroir-caisse à la monnaie européenne, s'adaptant bon gré mal gré à la chute vertigineuse du billet vert.
« Je ne veux pas rater des affaires, c'est pour ça que j'accepte les euros » depuis l'année dernière, explique Abdur Rahman, le responsable de Mita Inc., un petit magasin d'électronique grand public et de montres au cœur de Manhattan. Il assure recevoir des billets, autres que ceux ornés d'un président américain, « presque tous les jours. Je les prends et je les change à la banque ».
« Ce n'est pas étonnant avec tous les touristes européens qui viennent que certains magasins commencent à accepter les euros », juge Ernesto Freire, responsable communications de NYC & Company, organisation de la ville qui promeut le tourisme. Britanniques, Canadiens et Allemands en tête, 8,5 millions de visiteurs étrangers (un record !) ont arpenté la ville en 2007.
Les paiements en euros restent toutefois minimes. Certaines boutiques, dans les points névralgiques du tourisme new-yorkais, les acceptent, mais ne l'affichent pas. « On préfère prendre des dollars, on perd de l'argent quand on change », s'énerve le gérant d'un magasin d'électronique sur Times Square. D'autres fixent clairement les règles. « Aujourd'hui, 1 euro = 1,26 dollar », précise, sur le comptoir d'une boutique d'alcools de l'East Village, le petit tableau noir, où est écrit « euros acceptés ». Et il y a ceux qui ont opté pour l'humour, quitte à froisser le patriotisme américain. Une pancarte « Euros only » trône ainsi en évidence chez un antiquaire du sud-est de Manhattan. Le propriétaire, William Leroy, a récolté environ 2.000 euros en billets multicolores depuis qu'il l'a posée en novembre, au retour d'un séjour à Paris. « Le week-end dernier, 50 % des gens qui sont rentrés dans le magasin étaient Européens », se réjouit le commerçant franco-américain, qui compte utiliser ses euros pour faire des achats lors de son prochain voyage. « Il y a trois ans, je ne l'aurai pas fait, mais maintenant c'est impossible d'acheter en dollars » en Europe, raconte le commerçant.
Dans la capitale américaine des affaires, toute stratégie favorable au business est bonne à prendre. « Cela ne nous pose pas de problème que des magasins new-yorkais trouvent de nouveaux moyens pour amener les Européens à dépenser plus d'argent ici, à condition qu'ils ne soient pas arnaqués sur le taux et qu'ils paient toujours les taxes », déclarait récemment au Washington Post le porte-parole du maire Michael Bloomberg.
Anecdotique ?
Phénomène anecdotique ou stratégie commerciale ? Les paiements en liquide en monnaies étrangères restent l'apanage de quelques boutiques disséminées dans Manhattan. « Il est trop tôt pour dire si c'est une nouvelle tendance ou pas », considère Minerva Martinez, porte-parole de la Times Square Alliance, association de promotion de la zone, tandis que NYC & Company a commencé à consulter ses membres pour déterminer l'ampleur de cette pratique. De toute façon, « dans beaucoup des grands magasins, les clients, en particulier les touristes, paient principalement par carte de crédit » », relativise Bruce Brodoff, de Downtown Alliance, qui couvre la pointe sud de Manhattan. (afp)